Jouy-Sens

Aux portes de l’Hadès ?

Pour un oeil,

Pour une fesse ?

 

 

Jouy-Sens, une création artistique à double sens :

Jouy-sens est un confessionnal contemporain.

Côté pénitent à confesse, le verre, monté en vitrail traditionnel au plomb, est sérigraphié de motifs du célèbre tissu « toile de Jouy ».

Côté prêtre confesseur, les personnages des scènes de ce tissu sont déshabillés, sablés dans le verre sous forme d’hommes et de femmes nus.

De chaque côté de ce claustra, des assises adaptées aux conditions de chacun des protagonistes et tapissées de toiles de Jouy sont disposées.

La dimension provocatrice de cette réalisation est évidente. Pour autant, la question du sacré et du profane n’est qu’un prétexte. Au-delà de l’écho aux scandales de l’église qu’elle peut à priori présenter, cette pièce touche pour moi à des choses plus larges.

L’idée de provocation, bien qu’étant de toute évidence une dimension essentielle et récurrente de l’art contemporain, n’est pas ce qui m’importe en priorité. J’y préfére la notion de profanation au sens de Giorgio Agamben : celle de rendre à l’usage…

Jouy-sens certes, tend à questionner l’hypocrisie en général. Celle qu’il peut exister entre l’endroit et l’envers d’un décor ; les structures organisées du pouvoir et de la morale et l’application de ce pouvoir sur les croyants (qu’ils soient religieux, politiques ou idéologiques…). Ce qui m’intéresse est alors la conséquence du mensonge sur les constructions individuelles et sociales, sur les libertés, sur les corps, leur mise en spectacle pour mieux le cacher ; et la mise en relation de ces corps par un nouveau rapport à la parole qui, elle aussi, me semble souvent faire le jeu d’un navrant « communiquer pour mieux dissimuler » qui perd toute la dimension érotique du voilé-dévoilé d’un discours poétique, libre et sensible des corps.
Cette installation vise à questionner un tant soit peu l’usage de la langue et de la parole dans nos sociétés à la fois spectaculaires et pourtant si empreintes de résidus judéo-chrétiens. Elle interroge les rapports entre le mensonge, la vérité, l’aveu, la confession, la (dis)simulation, l’obscurantisme, la transparence… ceux de la faute et de la responsabilité.
Elle aborde nécessairement la notion de corps et de ses représentations dans les morales de tout ordre mais plus que cela, elle cherche à opposer à la croyance comme entrave à l’imaginaire, entrave à la présence du corps et de ses positionnements, une véritable croyance… celle rendue à l’usage de l’imaginaire.

 

La toile de Jouy :

A la fin du XVIIè siècle, grâce aux grandes compagnies de navigation, la France découvre les cotonnades imprimées de fleurs et animaux colorés, importées d’Inde. Suite à l’interdiction d’importation pour lutter contre la concurrence, puis la levée de cette interdiction au milieu du siècle, de nombreux teinturiers étrangers, devenus seuls détenteurs du savoir-faire, s’installent en France.

Parmi eux, Christophe-Philippe Oberkampf, graveur et imprimeur du Wurtemberg qui, en 1760, crée la fameuse manufacture de Jouy-en-Josas.

Les motifs les plus communément associés à la toile de Jouy, encrés dans l’imaginaire populaire sont les scènes de personnages en camaïeux. Pourtant, les motifs sont beaucoup plus variés. Les plus courants sont les motifs floraux et géométriques : les indiennes, issues du dialogue entre les cultures asiatiques et européennes de l’époque.

De 1760 à 1843 – date d’arrêt de la production – 30 000 motifs ont été créés pour la mode, les arts décoratifs et l’ameublement.

Le Musée de la toile de Jouy

Le musée de la toile de Jouy est riche d’une collection de près de 10 000 pièces. De nombreuses créations de la manufacture de Jouy – costumes, échantillons, gravures, dessins, empreintes (tests sur papier réalisés avant une impression), rideaux, parures de lit – y sont conservés et présentés ainsi que certains des outils utilisés à l’époque.

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